Mon ami Hervé me fait signe de la main à une soirée d’investisseurs. “Tu vois ce gars qui s’appelle William? Tu es peut-être en train de faire le parcours inverse du sien: du sport auto aux startup”.
Intrigué je m’approche de William, je l’ai déjà croisé dans l’univers des fonds d’investissements parisiens. Petite trentaine, silhouette longiligne, un peu grand pour être pilote de karting peut-être, gestuelle calme et chirurgicale. On engage la conversation sur notre passion partagée pour le sport auto. William Vermont a vraiment failli en faire son métier, puis faute de financement suffisant pour poursuivre son rêve, il s’est ‘rangé’ pour devenir VC. Il a déjà un joli track record d’investissements dans des startup qu’il a côtoyées de près comme Ankorstore ou Pennylane. Mais on parle de tout autre chose, j’ai envie de comprendre ce qui était encore son quotidien il y a 10 ans: la course auto.
Après l’interview de Julien Lemoine, cofondateur d’Algolia passé de la startup à la course auto, voici donc l’interview du parcours dans l’autre sens avec William Vermont, investisseur chez ISAI.
Quel est ton premier souvenir d’auto?
Mon père regardait les grand-prix le dimanche, c'était donc le grand rendez-vous du weekend. C'est ainsi que j'ai découvert la Formule 1 et le sport automobile. J'ai commencé à m’intéresser à cette discipline à la fin des années 90; Schumacher gagnait tout, puis lui succédèrent Alonso puis Hamilton.
Le souvenir auto le plus marquant de mon enfance fut de me rendre au grand prix de Monaco en 2005. Hamilton avait gagné en F3 et j'avais pu aller dans la pit-lane de la F1 le vendredi. Le son des V10 était magique dans les rues.
Lors de ta carrière en kart puis en auto, un pilote t’a t il marqué?
Pas directement parmi ceux qui couraient avec moi mais je suis un fan inconditionnel d'Hamilton et Senna.
Ton meilleur souvenir de course
Dans mes années kart (William remporta le titre de Champion France Nationale), ce fût la finale de la coupe de France à Valence en 2006. Je partais 3éme (sur 80), j'ai doublé les 2 premiers lors des 2 premiers tours et ensuite j'ai mené la course jusqu'à la fin ! ça semblait long mais en même temps un feeling extra à la ligne d'arrivée 😀
En auto, ce fut Spa en 2011 en F3 Euroseries. J'avais fait la pôle mais j'ai du partir en dernière position (22éme) lors de la course et il pleuvait. J'ai gagné. Donc c'était chouette surtout dans ces conditions sur une piste réputée pas évidente.
Quel est le métier le plus facile pour toi? VC ou pilote?
Je crois que sportif est bien plus difficile que la plupart des autres métiers. De l'extérieur ça peut sembler agréable mais dans le sport, le sportif est jugé à chaque événement et c'est une constante remise en question pour s'améliorer tout en devant garder une sérénité et une confiance en soi. L'équilibre n'est pas forcément simple à trouver, d'autant plus que le haut niveau est souvent constitué de hauts et de bas (parfois même au sein d'un même weekend). Il faut savoir rapidement synthétiser et tourner la page sur une note positive.
L'avenir est aussi beaucoup moins prévisible; sur les 5 années en sport auto, je ne savais jamais si j'allais pouvoir financer la saison suivante ...
En VC, tout est plus lent et nous sommes payés, donc ça me paraît moins difficile. Néanmoins, cela reste très difficile de délivrer une belle performance sur son portefeuille. Il faut juste être patient et attendre plusieurs années avant d'être jugé. La notion de temps est différente.
Imaginons que ton CV soit entièrement vierge, quelle profession choisirais tu? Tu n’as pas le droit de répondre pilote auto ni VC (car tu connais déjà).
Je dirais cavalier de saut d'obstacle à haut niveau. C'est certes ma nouvelle passion mais les sports équestres regroupent 3 piliers que j'apprécie :
L'exigence pour être suffisamment bon en tant que cavalier. Cela me plaît car ça me replonge dans ce que j'ai connu en sport automobile.
Une perspective d’entraîneur pour faire progresser ses chevaux. A l'image d'un sportif qui cherche à optimiser sa condition physique pour une discipline, il faut savoir faire la même chose avec son cheval. Je trouve cela passionnant - cela me rappelle cette démarche que j'avais pour améliorer ma condition physique.
Entrepreneurial car il faut investir dans des chevaux prometteurs à un jeune âge, les former et idéalement les revendre à leur pic de performance. Très similaire avec mon job de VC finalement.
Merci William de nous avoir partagé ton expérience. Voici quelques tours à bord de ta F3 de l’époque pour les amateurs de sensations fortes (Red Bull Ring 🇦🇹, Motorland Aragon 🇪🇸 et Imola 🇮🇹). Désormais, on peut te retrouver chez ISAI, le fonds d’investissement des entrepreneurs de la tech, en tenue de ville à Paris.
Teaser: Je vous prépare bientôt l’interview d’un autre pilote devenu chef d’entreprise pour redevenir pilote. En sport auto, les trajectoires sont rarement linéaires.