NL#38. Des filles et des moteurs
Réussir au féminin en sport automobile
Max Verstappen vient de gagner un 4ème titre mondial en F1 à Las Vegas. Mais quand arrivera enfin le sacre d’une femme pilote championne du monde de F1? Est-ce seulement réaliste d’en imaginer la possibilité? Je vous propose dans ce post quelques éléments de réponses ou du moins un peu de matière à réfléchir à cette question m’appuyant notamment sur le visionnage de 3 documentaires : Une pilote (disponible sur Canal+ 2021), #Racegirl, le destin de Sophia (Disponible sur Canal+ 2023), et Doriane P1 (disponible sur Canal+ 2024).
Est ce vraiment une question de genre?
En introduction du documentaire “Une Pilote” mettant en scène Margot Lafitte (célèbre commentatrice F1 sur Canal+) avec son père Jacques Lafitte, star française de la F1 des années 80, la phrase choc sort assez vite de la bouche de l’octogénaire pour donner le ton: “On dit un pilote et non pas une pilote, n’est-ce pas?”.
Le sport automobile est pourtant une discipline ‘non genrée’ à l’instar de l’équitation ou du nautisme au grand large où les femmes peuvent concourir contre des hommes. Dans les faits, mis à part quelques aménagements de préparation physique (la femme mettrait plus de temps à produire de la force que l’homme) et mentale (la femme serait moins tête brulée et prendrait moins de risques que l’homme), une femme pilote pourrait complètement postuler à l’excellence.
Dans la réalité, seulement 5% des licenciés en sport auto sont des femmes. Pire encore, la dernière femme pilote de notoriété connue en France remonte aux années 80… avec Michèle Mouton, vice championne du monde des rallyes en 1982.
La vraie question du modèle économique
Il suffit de visionner le très bon documentaire #Racegirl qui relate le comeback éblouissant de Sophia Flörsch pour comprendre qu’une femme est complètement capable de briller en sport auto et d’affronter tous ses dangers. Suite à l’un des crash les plus effroyables que la monoplace moderne nous ait montré, Sophia prouve qu’elle a la force mentale de revenir de l’au-delà, de ce terrible accident de F3 à Macao en 2018 alors qu’elle est la seule femme à concourir sur cette épreuve intercontinentale. 1 an plus tard, elle reprenait le volant pour un comeback époustouflant .
Le monde de la compétition auto est hélas injustement biaisé… peut-être pas tant par un manque de parité mais surtout par son modèle économique. J’ai un ami ancien pilote qui dit régulièrement “un enfant qui veut devenir champion auto? c’est la faillite familiale assurée”; en d’autres termes, en suivant la saison de Sophia en ELMS (European Le Mans Series), on se rend bien compte que ce qui coince n’est pas le talent évident de Sophia au volant… “Plus d’une dizaine de pilotes de la grille en Endurance ELMS sont des fils de milliardaires…” commente son team manager chez Algarve Pro, Sophia ne fait pas partie de ce club. Elle est pourtant la 1ère femme à être montée sur un podium LMP2 du très relevé championnat ELMS aux 4h de Portimao en 2021. Malgré un travail sérieux sur son image pour se créer une audience sur les réseaux sociaux, 90% de ses fans sont des hommes… pas de quoi attirer de nouveaux sponsors ciblant les femmes en sport auto hélas.
Doriane Pin, la recette gagnante?
Le documentaire produit cette saison 2024 sur la jeune prodige française montre combien il est finalement crucial de commencer sa carrière tôt, le plus souvent via le karting (Doriane a un titre de championne de France 2019). Les femmes pilotes débutaient en effet un plus tard que les hommes comme le révèle de documentaire ‘une pilote’; plus jeunes elles bataillent en peloton au milieu des garçons, plus l’expérience et la confiance se construisent au service de l’ambition. Doriane Pin a déjà un très beau palmarès auto à tout juste 20 ans aussi grâce à l’existence de structures comme les Iron Dames qui permettent aux femmes les plus rapides de courir en championnat du monde d’endurance en équipage 100% féminin. En monoplace, Doriane a déjà remporté 2 victoires en F1 Academy en 2024 avant les 2 derniers weekends du Qatar et d’Abu Dhabi. Mercedes AMG F1 Team (elle fait partie du Junior Program) la poussera-t-elle jusqu’en F1 pour prétendre un jour au titre suprème? Affaire à suivre.
Prochains rendez-vous de l’ 🆔 Society le 12 décembre 2024 pour une course en simulateur puis le 21 janvier 2025 à Paris pour un diner thématique avec des témoignages de jeunes prodiges du sport auto.
A très vite.